Chroniques rebelles
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Samedi 22 février 2020
Hirak en Algérie. L’invention d’un soulèvement. Sous la direction d’Omar Benderra, François Gèze, Rafik Lebdjaoui et Salima Mellah (la fabrique).
Panorama des cinémas du Maghreb et du Moyen-Orient, 15ème édition du 3 au 21 mars
Article mis en ligne le 23 février 2020

par CP

Hirak en Algérie
L’invention d’un soulèvement

Sous la direction d’Omar Benderra, François Gèze, Rafik Lebdjaoui et Salima Mellah (la fabrique)  [1]

En compagnie de José Garçon, auteure de deux textes : Un régime opaque et corrompu, habité d’un profond mépris du peuple et La périlleuse mise à nu d’un ordonnancement mafieux.

Panorama des cinémas du Maghreb et du Moyen-Orient
15ème édition du 3 au 21 mars

Depuis un an, la population algérienne manifeste en masse chaque vendredi et dans tout le pays pour réclamer un changement profond du système politique et le départ d’un régime en place depuis l’indépendance. Les slogans scandés, les chants, les banderoles sont on ne peut plus explicites : « Le peuple veut l’indépendance ! » « Qu’ils dégagent tous ! », « Les généraux à la poubelle ! » et témoignent d’une prise de conscience générale, toutes générations confondues. La population n’est plus dupe, la désinformation d’État, érigée « en arme de combat, particulièrement pendant la sale guerre des années 1990 » ne fonctionne plus, ni la répression ni la peur n’entravent le mouvement, le hirak, et son ampleur.

L’ouvrage, Hirak en Algérie. L’invention d’un soulèvement, met en lumière les raisons de l’émergence du hirak en revenant sur l’histoire algérienne, depuis son indépendance, en 1962, et la confiscation de celle-ci au profit d’un pouvoir militaire, qui se dissimule derrière les apparences d’un gouvernement civil. L’apport des textes présentés dans ce livre, leur complémentarité, génèrent une réflexion profonde sur l’histoire officielle algérienne, sa réécriture et la propagande d’un pouvoir militaire, qui ne dit pas son nom.

Les manifestations pacifiques et spectaculaires du vendredi, et du mardi pour les étudiant.es, défient non seulement un pouvoir déliquescent, mais reviennent aussi sur une histoire escamotée, celle des luttes pour l’indépendance, et le récit officiel, complexe et flou, sur les « années de sang ». De la même manière, le hirak, remet en mémoire l’imposture de la « réconciliation nationale », présentée depuis 1999 comme l’œuvre de Bouteflika, qui s’avère être une « vaste opération d’amnistie et la tentative d’imposer l’amnésie à l’ensemble de la population. » Ce qui n’a d’ailleurs pas empêché la permanence d’un « terrorisme résiduel », histoire de consolider le pouvoir militaire et d’entonner l’antienne de l’« ultime rempart contre l’intégrisme islamiste ».

Un régime opaque et corrompu, habité d’un profond mépris du peuple, comme le qualifie José Garçon dans le titre de sa contribution. Opaque certes, et paranoïaque : « la nécessité impérieuse du secret, forgée pendant la guerre clandestine contre l’occupant français, était devenue l’essence même de l’exercice du pouvoir. Comme si gérer un pays était équivalent à mener une guerre. Sauf qu’à la place du colon français et de son armée, il n’y a qu’une masse : le peuple algérien. » Il s’agissait donc d’entretenir le mythe d’une société aux apparences « démocratiques » afin de détruire toutes les tentatives d’organisation indépendante, politiques, syndicales ou culturelles. D’où l’importance pour le régime de « mêler le vrai et le faux pour rendre crédible l’incroyable et mettre en avant des motivations nobles pour masquer des buts souvent inavouables. »

L’ouvrage, Hirak en Algérie. L’invention d’un soulèvement, en réunissant les contributions d’Algériens et d’Algériennes, vivant le hirak sur place, et celles de spécialistes, en Algérie et en France, qui observent l’actualité du pays depuis des décennies, Hirak en Algérie témoigne de l’extraordinaire soulèvement pacifique d’une population et de sa détermination, ainsi que de sa lucidité sur la nature d’un régime militaire corrompu. Pour comprendre les origines profondes du soulèvement, les auteur.es rendent compte de ses multiples facettes, de l’inventivité et de l’humour des manifestant.es. La place des femmes est essentielle, comme celle des jeunes, qui revendiquent une indépendance dont ils et elles ont été exclu.es depuis 1962. Les textes remontent l’histoire, les différentes étapes de soixante ans de « démocrature », analysent les récentes évolutions d’un régime pour sauver ses privilèges, les tentatives de diviser le mouvement, la répression exercée par les forces de sécurité, le rôle de la presse et des réseaux sociaux. Enfin le livre s’intéresse aux effets du hirak au sein même du pouvoir — avec les règlements de comptes à la tête de l’armée et de la police politique, une opération mains propres quelque peu tardive —, ainsi que sur les réactions au niveau international vis-à-vis du mouvement contestataire. De nombreuses questions sont restées sans réponse, évacuées, et ce livre tente également d’y répondre.

Cette large réflexion sur le hirak fait penser à Franz Fanon, qui expulsé d’Algérie durant la guerre d’indépendance, dénonce les conséquences de la colonisation dans une lettre ouverte au gouverneur général : « l’inégalité, le meurtre multi-quotidien de [l’être humain] étaient érigés en principes législatifs […]. Les événements d’Algérie sont la conséquence logique d’une tentative avortée de décérébraliser un peuple ». Aujourd’hui, les manifestant.es du hirak disent : « Vous n’êtes pas le premier colonisateur, vous partirez comme eux ». En 1962, au moment de l’indépendance, la moitié de la population algérienne est démunie, écrit Elaine Mokhtefi dans son livre, Alger, capitale de la révolution, « Le sous-développement résultait d’un colonialisme fondé, comme ailleurs, sur le racisme et l’inégalité, dont les objectifs étaient la mainmise sur les ressources du pays et la destruction de sa culture ». Elaine a participé aux premières années de l’Algérie indépendante en tant que journaliste et interprète alors qu’Alger devient le « carrefour pour tous les mouvements de libération et antifascistes des années soixante. »

Depuis le 22 février 2019, il y a un an, les Algériennes et les Algériens manifestent leur rejet d’un système inique et corrompu, et revendiquent une réappropriation de leur histoire, le hirak est certainement un soulèvement exemplaire qui remet en question le roman national en clamant : « le Peuple veut l’indépendance ! »

Panorama des cinémas du Maghreb et du Moyen-Orient
15ème édition du 3 au 21 mars

À l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, le 8 mars, le Panorama des cinémas du Maghreb et du Moyen-Orient, en partenariat avec la Mission droits des femmes de la ville de Saint-Denis, met le projecteur sur : Femmes et cinéma.
Outre les films de 40 réalisatrices (68 % des cinéastes de la programmation sont des femmes), le festival propose de nombreuses rencontres, tables rondes, rendez-vous festifs… et une nouvelle compétition : le Prix des dionysiennes !

Programme Femmes et cinéma
Mardi 3 mars – 15h30, une table ronde : Les femmes dans les métiers du cinéma.
Mercredi 4 mars – 18h, autre table ronde : Le rôle des femmes dans le Hirak en Algérie avec projection de trois documentaires de réalisatrices de l’atelier de Timimoun, et la présence de la Souad Massi, chanteuse et auteure engagée.
Jeudi 5 mars – 18h, table ronde : Figures féminines inspirantes dans le cinéma et projection du film Les Femmes selon les hommes de Saeed Nouri.
Vendredi 6 mars – 18h30 : carte blanche à la réalisatrice iranienne Ghasideh Golmakani qui fera un focus sur les réalisatrices iraniennes. À 22h30 : soirée DJ set avec Julie Lojkine à l’école Auvray Nauroy.
Samedi 7 mars – 14h : Pygmalionnes de Quentin Delcourt. Et à 16h, une table ronde : Enjeux de domination dans l’industrie cinématographique. Également le samedi 7 mars – à partir de 14h, sur la Place du Caquet, à Saint-Denis, des animations seront proposées par les associations de la ville autour du thème Femmes et cinéma.
Dimanche 8 mars – 11h, un brunch littéraire : Poétesse iraniennes. 16h : en avant-première : The perfect candidate de Haïfa Al-Mansour. 18h : remise des prix de la 15e édition + concert de Samira Brahmia.

À présent, les films long métrages documentaires en compétition pour le prix des dionysiennes :
Mercredi 4 mars – 14h15 : Sonita de Rokhsareh Ghaem Maghami
Jeudi 5 mars – 16h : On nous appelait beurettes de Bouchera Azzouz
Vendredi 6 mars –14h : Zeinab’al moto de Dima El-Horr
Un jury intergénérationnel de lycéen.nes, de la Maison des seniors et d’associations de quartiers décerneront un prix de la figure féminine inspirante à l’un de ces 3 films documentaires (les séances sont ouvertes à toutes et tous).

Le Panorama des cinémas du Maghreb et du Moyen-Orient
15ème édition du 3 au 21 mars

met les cinématographies iraniennes à l’honneur, de même que la production algérienne contemporaine. Et bien sûr les femmes, qu’elles soient devant ou derrière la caméra, y occupent une place de choix. Sera projeté notamment un film documentaire de Marianne Khoury, Parle-moi d’elles. Le film sera suivi d’une rencontre avec Marianne Khoury, qui a notamment réalisé Les Passionnées du cinéma, un film retraçant les débuts du cinéma en Égypte et l’importance des femmes dans les studios, la production et l’interprétation.
Les rencontres sont multiples, avec Sofia Djama, réalisatrice des Bienheureux, Souad Massi qui donnera un concert, des focus sur le cinéma iranien avec Bamchade Pourvali et Ghasideh Golmakani, le cinéma algérien contemporain…
8 avant-premières, 11 films inédits, une compétition de courts métrages, sans oublier la découverte ou la redécouverte sur grand écran de succès populaires, en tout soixante films de fiction et films documentaires… S’agissant du hirak, il faut voir Fragments de rêve de Bahia Bencheikh-El-fegoun
Panorama des cinémas du Maghreb et du Moyen-Orient
15ème édition du 3 au 21 mars
www.PCMMO.org