Chroniques rebelles
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Calle de la Pietà. Film documentaire de Mario Brenta et Karine de Villers
Christiane Passevant
Article mis en ligne le 27 mars 2011

par CP

Cette année, la sélection des documentaires faite par l’équipe du Festival du cinéma méditerranéen a été d’une très grande qualité et il est aisé d’imaginer la difficulté du jury à choisir l’un des films. Calle de la Pietà de Mario Brenta et Karine de Villers est l’un de ceux qui a certainement marqué ce festival.

Film documentaire de création, Calle de la Pietà [1] est une chronique, entre réel et imaginaire, de la dernière journée de la vie du Titien, le 26 août 1576. Le peintre meurt lors d’une épidémie de peste qui fait de nombreuses victimes dans Venise et aux alentours.

Le film, co-réalisé par Mario Brenta [2] et Karine de Villers [3], est prétexte à une réflexion sur le temps, la création, son essence et sa signification. C’est aussi une découverte différente de Venise, une balade intemporelle, onirique et esthétique. Couleurs, peintures, matières, images se croisant, se superposant avec pour fil rouge la dernière toile du Titien, inachevée, figée dans une réalité qui en quelque sorte la complète, la transforme, l’universalise plus de quatre siècles plus tard, par la magie du cinéma.

C’est, explique Mario Brenta, « un film documentaire sur un repérage hypothétique pour un film qui n’a jamais été fait et qui ne se fera jamais. Un repérage recherche-filmé, vécu comme un rêve, de la même manière que le rêve crée des mondes imaginaires mais qui apparaissent comme réels, possibles.
Une réalité reprise du passé à travers une réalité d’aujourd’hui qui, en même temps, est proche et lointaine, égale et différente par rapport à celle
d’hier. »

En parallèle, il y a cette descente de croix, cette Pietà ébauchée [4], comme pour défier la mort omniprésente dans la ville et destinée à la sépulture du peintre mourant, et cette jeune femme qui vit auprès de lui et semble abjurer la présence de la mort. Le Titien, on ne le voit pas, sinon son ombre, les pinceaux, les couleurs, l’atelier et sa ville… Mais est-ce Le Titien ? Cela pourrait être n’importe quel peintre ou créateur ? La jeune femme, elle représente la vie, sort dans Venise, habite l’image avec sa chair, sa chevelure, sa présence. Les animaux observent…

La vie, la mort, la création, le temps, le cinéma… D’où ce questionnement face à la réalisation : « il est quoi l’auteur d’un film sinon un glaneur, un ordonnateur, un transformateur d’images et de sons fixés emprisonnés dans le monde immobile de la pellicule pour qu’ils soient rendus à nouveau vivants à travers leur retour dans le temps ? »

Calle de la Pietà est un film documentaire à part, une œuvre d’art en soi, une rencontre et une leçon de cinéma, pour le cadre, l’image… Il inspire indéniablement une réflexion sur l’image en mouvement, ou fixe d’ailleurs. Images sur l’éphémère et sur la mémoire des signes, de la matière. Un film rare à voir absolument, pour sa beauté et son originalité.

« Film-paradoxe sur le dernier jour de vie de Titien. Film-essai, film d’expérimentation où la narration devient réflexion. Film-tableau, tableau éclaté où la peinture — qui est en principe espace — devient temps. Temps d’un récit ponctué par les sons des cloches, mais où le temps est suspendu — peut-être à jamais — comme sur le cadran d’une horloge à laquelle on aurait arraché les aiguilles. »

Et tout commence par une mouche sur un drap blanc…

Christiane Passevant : Lors de la présentation du film, vous avez dit que vous n’aviez tout d’abord pas voulu faire ce film, mais que, finalement, pendant le tournage, vous aviez pris la caméra.

Mario Brenta : C’est vrai. Au début j’ai résisté bien qu’étant à l’origine de l’idée du film. Mais faire une fiction qui reconstruirait un passé, la Renaissance, ne m’avait pas convaincu et j’avais abandonné le projet. Je pense que le cinéma est un moyen d’expression qui se travaille bien dans le temps présent, c’est pour moi dans ses racines les plus profondes. Par la suite, la proposition de Karine de faire autre chose m’a semblé intéressante, mais en même temps je n’étais pas complètement séduit par l’idée de faire une sorte de journal de repérage d’un film qui ne se ferait pas. Et de le filmer comme cela, caméra à l’épaule, filmer des lieux, les gens qui posent des questions, des entretiens… Cela ne me correspondait pas. J’ai donc offert d’accompagner Karine dans son voyage, mais la puissance des choses et une fois sur place, au lieu d’expliquer ce qu’il fallait faire, j’ai trouvé qu’il était plus simple de prendre la caméra et de filmer. Je suis ainsi entré dans le film et j’ai trouvé alors une syntonie avec les matériaux visuels et cela a été un plaisir.

Larry Portis : Vous êtes entré dans ce projet comme un peintre ? Cette impression vient des images du film, composées, d’une beauté inouïe, comme si vous peigniez.

Mario Brenta : Tout d’abord merci. Il y a en fait deux registres dans le film, l’un qui se développe dans la diachronie, notamment dans le montage, c’est-à-dire les liens établis entre les différentes images, et un registre synchronique et centripète qui est le registre pictural, et cela déjà dans le choix du format choisi — 4/3 — qui reproduit un peu le rapport que l’on trouve dans la peinture, plutôt qu’avec un format panoramique. On raconte une histoire et il y a évidemment une chronologie, cependant je pense que chaque plan a un message, qui agit en relation aux autres plans, mais qui un message en soi. Cela est la définition même du cadrage. Le cadre est très important, mais la composition n’a pas seulement un côté esthétique, elle est son essence même.

Christiane Passevant : Les gros plans sur le bras, la chair qui est très présente, les plantes, les feuilles, l’utilisation des flous aussi avec le point fait sur un autre sujet, en arrière plan, tout cela fait penser à des tableaux.

Mario Brenta : Effectivement, il y a un travail sur la profondeur de champ avec une sélection de plans, d’où l’utilisation des différences de point. Les flous reproduisant le point de vue du Titien qui ne voyait plus. Cela donne aussi plus d’épaisseur à la matière visuelle. On entre ainsi dans la chair.

Larry Portis : Vous superposez des images sur les tableaux parfois, grâce à des fondus enchaînés.

Mario Brenta : Pendant la séquence du marché, lorsque l’on fait le parallèle avec la viande dans les vitrines, les produits, les poissons, les champignons, les aubergines avec les tableaux du Titien. Ce sont des éléments, la vie et la mort, qui jouent de façon dialectique. Il était intéressant de raconter une journée de 1567, comparée à aujourd’hui, sans rien toucher à la réalité de Venise telle qu’elle est.

Christiane Passevant : Et c’est justement très fort avec l’atelier de peintre. Ce n’est pas une reconstitution et pourtant on a l’impression d’être dans l’atelier du Titien. On trouve les mêmes éléments, le même cadre. Les couleurs se fabriquaient différemment, mais les matières paraissent les mêmes.

Mario Brenta : Cet atelier a été une découverte. Karine voulait filmer un atelier, sans que cela soit une reconstitution. J’ai alors demandé à une amie si elle connaissait un peintre installé à Venise et elle m’a tout de suite parlé de Biagio Gibilterra et de son atelier. Je connaissais ses peintures, mais pas lui. Nous sommes montés au dernier étage d’un palais vénitien et là, dans ce grenier, l’atelier… Incroyable. C’est à la fois un atelier et une maison, et la vue panoramique sur Venise est magnifique. C’est comme un observatoire.

Christiane Passevant : Les animaux jouent un rôle important dans le film, les chats, les chiens, les mouettes, les pigeons, les poissons, le rat…

Mario Brenta : Leur rôle est important et il y a deux éléments : Le Titien qui lutte contre la mort, Madeleine qui représente la vie et, en même temps, apporte la mort car elle est le temps et le temps passe jusqu’au moment de la vérité.

Larry Portis : C’est une expression de la mortalité en fait ?

Mario Brenta : Oui. Il me vient à l’esprit une pensée de Nietzsche qui dit que l’art existe pour que l’on puisse ne pas voir la vérité. Et l’on sait bien ce que signifie ici la vérité, c’est justement ce contre quoi Le Titien lutte.

Christiane Passevant : Le temps est présent tout au long du film, y compris sous sa forme sonore avec l’horloge qui joue le métronome qui scande le temps et avance inexorablement. La bande-son est de ce point de vie très forte, mixant les ambiances de rue, le temps qui passe, Malher qui fait référence à Mort à Venise de Visconti…

Mario Brenta : Il fallait citer quelque chose, mais revenons aux animaux. Je pense que les animaux sont un peu le monde, le regard du monde, c’est-à-dire un regard innocent et qui se situe aussi par rapport à la mort. Je reprends Nietzsche une fois encore qui parle de la béatitude des animaux parce qu’ils ne connaissent pas leur sort. Ils sont là et ils réagissent ; ils sont dans le temps présent. Ils ne peuvent se projeter dans le futur et vivent leur vie, instant après instant. Ils sont des témoins de ce qui se passe.

Larry Portis : L’art va à l’essentiel de la réalité, mais ne peut la représenter éternellement ?

Mario Brenta : C’est cela. C’est la grande illusion de l’art qui, s’il réussit, nous fait oublier la réalité, mais en même temps est un échec. Dans le film, il est clair que l’œuvre d’art est une trace de son auteur-e, de sa présence, cela dure dans le temps, mais ce n’est pas éternel du tout. Même si l’on peint une Pietà, un tableau où est représenté un mort qui va renaître et vivre éternellement, c’est la grande illusion, le grand échec. Et le fait que Le Titien n’arrive pas à terminer son tableau, c’est un peu le court-circuit qui déclenche l’histoire.

Larry Portis : Et le cinéma ?

Mario Brenta : Le cinéma ? C’est la nostalgie. Le cinéma est très enraciné dans le temps présent parce que c’est une réalité que l’on peut reproduire, et une fois reproduite, elle est présente. Mais elle est ancrée dans le passé. Le cinéma est aussi le temps passé si l’on pense qu’au moment où l’on enregistre quelque chose, c’est déjà la mémoire.

Christiane Passevant : Vous travaillez actuellement sur un projet de film ?

Mario Brenta : Pas encore. Mais j’ai un ancien projet qui est un peu un élément qui revient dans ma vie, je l’ai abandonné plusieurs fois pour faire autre chose et ensuite je le reprends. J’ai présenté ici l’un de mes films, Barnabo delle Montagne (1994), dans le cadre du Festival du cinéma méditerranéen, que j’ai réalisé dix ans après l’avoir pensé et écrit. Pour l’instant je donne des cours dans une école de cinéma. J’aimerais répéter, renouveler cette expérience de la vidéo. J’ai beaucoup aimé travailler ainsi à deux. Dans presque tous mes films sur support pellicule, j’ai fait le cadre, et dans Calle de la Pietà, je fais aussi la direction de la photo. J’aime travailler, disons, sans trop de schémas, sans préjugés et en rapport direct avec la réalité, les choses, de manière à ce que ces choses nous parlent, viennent à nous.

Un second entretien a eu lieu à Radio Libertaire, dans l’émission des chroniques rebelles, en compagnie de Karine de Villers et Mario Brenta, le samedi 6 novembre 2010.

C’est en prêtant son corps au monde que le peintre change le monde en peinture…

Ainsi commence le film-essai — récit d’une expérience de cinéma et de voyage intime — de Karine de Villers et Mario Brenta. Calle de la Pietà soulève bien des questions sur la création cinématographique, sur le processus de création et le temps d’écriture d’un film pour entraîner le public dans un univers, dans la vision personnelle d’une ville, dans un temps figé où les repères se brouillent… Et l’on se demande même si la réalisatrice, Karine de Villers, et le réalisateur, Mario Brenta, ne découvrent pas eux-mêmes ces questions au fur et à mesure du tournage. Les deux auteur-es expliquent : C’est un « film-essai, film d’expérimentation où la narration devient réflexion. Film-tableau, tableau éclaté où la peinture — qui est en principe espace — devient temps. Temps d’un récit ponctué par les sons des cloches, mais où le temps est suspendu — peut-être à jamais — comme sur le cadran d’une horloge à laquelle on aurait arraché les aiguilles. »

Le synopsis pourrait se résumer à la chronique d’une journée du peintre Le Titien, sa dernière journée, puisqu’il est victime, la nuit suivante, de l’épidémie de peste qui sévit à Venise en 1576. Mais, si exprimé ainsi, cela semble simple et cadré par un rythme chronologique, c’est au contraire tout à fait complexe et en rupture avec une perception traditionnelle du temps. À la vision du film, des portes s’ouvrent à l’infini, comme un écho qui se répercute et se reproduit, le tableau dans le tableau, dans le tableau… Cela donne une expression cinématographique, visuelle et sonore qui emporte le public dans un voyage onirique à travers le temps, à travers Venise, la création, avec pour fil rouge, la vie… Une vie représentée, non par la peinture du Titien qui traverse les âges, mais par cette jeune femme qui nous promène à travers la ville, l’atelier du peintre, le marché, la matière, l’ombre et la lumière…

Repérage pour un film de fiction qui ne se fera pas ? Chronique vénitienne intemporelle ? Réflexion sur la création, éphémère ? Calle de la Pietà est une ode cinématographique, entre rêve et réalité, un film inclassable… Une leçon éblouissante de cinéma et d’humanité d’où le regard interrogateur porté sur la réalisation : « il est quoi l’auteur d’un film sinon un glaneur, un ordonnateur, un transformateur d’images et de sons fixés, emprisonnés dans le monde immobile de la pellicule pour qu’ils soient rendus à nouveau vivants à travers leur retour dans le temps ? »

Mario Brenta : On parle souvent du réalisateur comme d’un créateur, mais je crois que nous ne créons pas grand chose, nous sommes plutôt des inventeurs dans le sens étymologique du mot, nous trouvons des choses qui sont déjà là. Nous les reprenons en les disposant différemment, dans une logique différente et voilà : nous sommes des manipulateurs de citations. Nous recherchons aussi un court-circuit de sens où les choses parlent seules tout en gardant une certaine opacité, un mystère. Et c’est le cas pour la musique de Malher que nous avons utilisé dans le film.

Christiane Passevant : Il n’y a pas que la musique de Malher qui garde son mystère, tout le film l’est. Ce n’est pas un film de fiction ni un documentaire à proprement parler, c’est autre chose. Qu’est ce qui a initié cette forme cinématographique, ce projet ?

Mario Brenta : C’est le résultat d’une liberté d’approche, d’une sincérité retrouvée à partir d’une idée qui, en ce qui me concerne, s’était en quelque sorte sclérosée sur elle-même. Le vrai déclic, c’est Karine.

Karine de Villers : L’histoire a en effet commencé par cette idée que Mario m’a racontée alors que nous étions dans un musée à Amsterdam qui avait organisé une rétrospective de l’œuvre de Rembrant. J’ai trouvé son idée très belle de faire un film de fiction sur Le Titien. J’ai pris des notes et lui ai demandé si l’atelier du Titien existait encore et nous sommes parti-es à Venise, à la recherche de la demeure du Titien. Et c’est en faisant cette recherche que m’est venue l’idée de faire un film à partir des traces. J’aime faire des films à partir des absents, c’est-à-dire à partir des êtres qui ne sont plus là. Alors ce petit morceau de façade où est mentionné son nom, ce morceau de jardin découvert par un interstice de la porte m’ont permis d’imaginer ce qu’avait connu Le Titien. Ensuite, tout est venu de manière très naturelle, il n’y avait aucune tentative de reconstitution.

Christiane Passevant : Une découverte au fil de la réalisation…

Karine de Villers : Une découverte du désir de faire un film à partir de de très peu de choses. Le récit de Mario a été un squelette pour la trame du film. Dans le projet de fiction, il y avait cette femme, des éléments qui suggéraient la vie, mais aussi la mort. Nous avons travaillé la-dessus et c’est en se promenant dans Venise que les éléments nous sont apparus. Nous n’avons pas écrit un scénario en pensant que tout devait commencer par une mouche. Je prenais des notes et je faisais des croquis et, peu à peu, Mario est entré dans le projet. Il a fait l’image et chaque image est un tableau.

Mario Brenta : J’ai finalement fait le cadre parce que c’était plus simple que de montrer ce qu’il fallait faire à travers des mots. C’était plus immédiat et plus dense en ce qui concerne le sens. Le personnage de Madeleine, qui est à la fois transféré dans le tableau du Titien où elle se révolte et dans la vie puisqu’elle s’occupait du peintre, s’est incarné dans Karine. Et de ce fait elle a un double rôle, réalisatrice et personnage, elle est dedans et dehors, une figure de transition, de passage.

Christiane Passevant : Ce personnage incarné par Karine sème le trouble…

Karine de Villers : Je crois que trouble vient aussi du fait que l’on entre dans notre intimité. En fait c’est cela. C’est un film de Mario et moi où nous sommes très présents avec ce que nous sommes, avec notre personnalité. Et même lors du montage que j’ai fait en grande partie, c’est ce que j’ai ressenti : le croisement de deux êtres qui ont une œuvre en commun. C’est vraiment une création à deux et, même si cela n’est pas mis en avant, je pense que le film montre un parcours de vie aussi. Le film raconte aussi tous les lieux où nous avons vécu à Venise…

Mario Brenta : Et ces images sont des images volées. Par exemple lorsque Karine dort.

Christiane Passevant : Se dégage aussi du film le sentiment de durée, de s’attarder sur les images filmées. On ne sent pas le caractère d’urgence pour tenir le budget du film…

Karine de Villers : Le film s’est fait sans budget, sans argent, sans producteur, durant un an et demi. Nous l’avons fait en totale liberté et c’est une expérience unique. Nous n’avons pas créé, comme le dit Mario, mais les choses étaient là et nous les avons vues. Nous étions en syntonie avec le réel. Nous les avons vécues. On se promène et soudain il y a un chien qui fait le mort, c’est un acteur extraordinaire. Nous installons la caméra et il reste là, dans la même position. Une autre fois, il y avait ce rat qui ensuite a disparu dans l’eau avec les poissons.

Mario Brenta : C’est un endroit de Venise très caché, magique, où il y a cette porte qui donne sur l’eau.

Karine de Villers : Dans ce lieu, nous avons filmé une dizaine de plans du film, l’eau, les reflets, les parois de pierres magnifiques et, lorsque nous filmions, nous avons remarqué une inscription gravée dans la pierre : Mario.

Mario Brenta : Il y a des lieux magiques dans le monde, des lieux porteurs de valeurs universelles. Mais il faut du temps et pouvoir se laisser surprendre. Et dans ce film, il y a un parcours à deux de réflexion, de maturation. Au fur et à mesure que l’on avançait dans le film, nos regards devenaient plus clairs. Cela été une expérience de vie, existentielle.

Karine de Villers : L’atelier de peintre était aussi magique à cause de la lumière, un lieu baigné dans l’ombre et la lumière. C’était parfait avec une vue magnifique sur les toits de Venise. Et nous avons filmé les gestes du peintre qui apparaissent, disparaissent, les pinceaux, les couleurs…

Pour le montage, c’était ma première expérience. Ma chance, c’est que les plans sont d’une grande beauté. Quant au rythme, nous l’avons trouvé très vite, calqué sur le va et vient des vagues, et j’ai travaillé l’univers sonore qui est très aquatique. C’est en fait une composition sonore, puisée dans des sons qui ne sont pas enregistrés sur place, mais qui appuie les images. Le travail de montage consistait à trouver le sens de ce que nous voulions dire. C’est difficile d’en parler ; le premier plan que j’ai monté, c’était une vague.

Le premier entretien a eu lieu à Montpellier, le vendredi 29 octobre 2010, dans le cadre du 32e Festival du cinéma méditerranéen (CINEMED) où Calle de la Pietà était présenté dans la sélection pour la compétition Documentaires. Présentation, transcription et notes Christiane Passevant.

Le second entretien est extrait d’une émission radiophonique, chroniques rebelles, sur Radio Libertaire, à laquelle ont participé Karine de Villers et Mario Brenta, le samedi 6 novembre 2010.